(“The Formalist Challenge to Darwinism”)[1]
Par M.J. Denton Il est généralement reconnu que tout être organique a été formé par deux lois générales : l’Unité de Type et les Conditions d’Existence. Par unité de type, on entend un accord fondamental dans la structure, que l’on voit dans des êtres organiques de la même classe, plutôt indépendant de leurs habitudes de vie …. Charles Darwin (1872) Origin of Species, 6th Edition (“l’Origine des Espèces”, 6ème Edition). La plupart des organismes sont bien adaptés à leur environnement immédiat [conditions d'existence], mais sont aussi construits selon des plans anatomiques de base qui transcendent toute circonstance particulière. Pourtant, de façon curieuse, les deux principes semblent opposés – car pourquoi des structures adaptées à des fins particulières devraient-elles enraciner leur structure de base dans des homologies qui n’expriment pas une fonction commune ? L’appellation d’un principe ou d’un autre en tant que fondement causal de la biologie définit pratiquement la position de n’importe quel scientifique par rapport au monde organique et aux causes de l’ordre qui y règne. . . Devrions-nous considérer le plan taxonomique de haut niveau comme premier, avec l’adaptation locale vue comme des froissements mineurs sur une majesté abstraite ? Ou est-ce les adaptations locales qui construisent l’ensemble du système du bas vers le haut? Cette dichotomie donnait le ton au grand débat de la biologie pré-darwinienne. —Stephen J. Gould[2] Si nous sommes obligés (de par certains aspects d’une structure universelle, d’une nécessité psychique, ou simplement de par les normes de la culture occidentale) de mettre de l’ordre dans notre monde par des dichotomies, nous pouvons au moins choisir quelques grandes divisions qui apportent clarté sur nos sujets ainsi qu’approfondissements en nous-mêmes. Les dichotomies stériles sont établies en tant que points de débat afin qu’un côté (généralement inventé) soit ridiculisé, et que l’autre (le nôtre), apparaisse indéniablement juste et équitable. Les grandes dichotomies [entre la conception structuraliste et fonctionnaliste de la vie] présentent des alternatives ayant de fortes dynamiques intellectuelles et jouissant d’un fort soutien empirique. Aucun des deux groupes n’a raison, les deux sont infailliblement intéressants …. —Stephen J. Gould[3] RESUME De nombreux biologistes pré-darwiniens appartenant à la tradition dite ”formaliste” (ou structuraliste) considéraient les homologies invariantes sous-tendant la diversité adaptative de la vie comme étant des caractéristiques immanentes de la nature, c’est à dire des types naturels – analogues aux atomes ou aux cristaux – qu’Owen appelait des « Motifs Premiers » (“Primal Patterns’ ”). La vue formaliste du monde d’avant 1859 de la biologie et la notion d’une biologie basée sur des lois ne reposaient pas, comme les darwinistes l’affirment souvent, sur ??une croyance philosophique a priori en une substance primordiale ou sur des concepts platoniciens, mais plutôt sur ??l’observation empirique qu’une partie importante de la complexité biologique – y compris les homologies qui définissent les taxons du système naturel – semble être de nature non-adaptative, dotée d’un caractère parfois frappant en terme numérique et géométrique qui est difficile à expliquer en termes fonctionnalistes. Non seulement ces homologies, entre des êtres parfois très différents, sont apparemment non-adaptatives, mais encore plus significatif, elles présentent une robustesse et une stabilité extraordinaires, dans de nombreux cas invariantes dans diverses lignées durant des millions d’années tandis que les adaptations construites sur elles présentent d’énormes variations. C’est cette persistance des caractères définissant les taxons qui rend la classification biologique possible et qui permet la construction d’arbres phylogénétiques. Darwin admit que ces homologies sont non-adaptatives dans les organismes existant actuellement, mais son explication comme quoi elles auraient été adaptatives autrefois sous leurs formes ancestrales n’a jamais été validée. Au cours des dernières décennies, un certain nombre de développements en science fondamentale a fourni un nouveau soutien pour la position structuraliste. Tout d’abord il y a la découverte que les lois de la nature semblent être affinées pour la vie telle qu’elle existe sur la terre – une découverte qui est compatible avec la conception structuraliste de la vie comme étant une caractéristique immanente de la nature. Deuxièmement, il y a les progrès liés à la révolution en biologie moléculaire au milieu du 20ème siècle qui ont révélé qu’au niveau moléculaire et cellulaire, une quantité considérable de la complexité biologique est clairement déterminée, non pas petit-bout par petit-bout par la sélection naturelle, mais par la loi naturelle, et plus particulièrement par les lois de la chimie et de la physique qui régissent toute structure macromoléculaire. Les protéines se reploient, différentes formes membranaires et même la forme de la double hélice sont des formes naturelles dont les propriétés et les belles géométries surviennent, comme pour les atomes et les cristaux, à partir des propriétés immuables d’auto-organisation de la matière. Troisièmement, il y a le fait remarquable que, malgré l’augmentation récente de notre connaissance de la génétique du développement d’un grand nombre de ces “motifs premiers”, y compris des exemples aussi divers que les membres antérieurs et postérieurs des vertébrés (Owen), les fleurs des angiospermes (Goethe) et le plan de base de l’aile du papillon, le défi reste ; ni l’origine, ni la persévérance, ni la nature fondamentale de ces plans de base, n’ont été expliquées ni même ont bénéficiées d’explications fonctionnalistes. Dans les mots de Günter Wagner, une autorité de premier plan dans le domaine de la biologie du développement :”il n’y a toujours pas d’explication pour la stabilité des types de développement … [donner une explication est] … le problème théorique le plus urgent dans l’unification du développement et de l’évolution.”[Souligné par moi]. IntroductionPendant deux siècles, les biologistes ont été divisés en deux camps opposés concernant la nature fondamentale des êtres vivants – les formalistes (ou structuralistes) et les fonctionnalistes.[4] Selon le structuralisme, une partie prépondérante de l’ordre de la vie est le résultat de contraintes physiques de base découlant des propriétés de la matière, plus spécifiquement la matière vivante. Ces contraintes limitent la façon dont les organismes sont construits[5] à quelques modèles de base. Et cela implique que les formes de base de la vie surviennent de la même manière que celles des autres formes naturelles, comme les galaxies ou les atomes, et qu’elles sont authentiquement universelles. Les structuralistes adhèrent donc totalement à une vision du monde biologique strictement ”non-sélectionniste” et ”non-historiciste”.[6] Les principaux structuralistes du 20ème siècle incluent D’Arcy Wentworth Thompson,[7] Rupert Riedl,[8] Brian Goodwin[9] and Stuart Kauffman[10]. Selon le paradigme opposé, le fonctionnalisme, les principales formes de la vie ne sont pas le résultat de lois physiques, mais plutôt le résultat d’adaptations spécifiques construites par sélection ou contingences historiques (adaptations spécifiques précédentes des formes ancestrales dont nous avons hérité). C’est bien sûr le point de vue qui prévaut actuellement. Tous les darwinistes, et donc la grande majorité des biologistes de l’évolution, sont fonctionnalistes par définition, puisque selon le darwinisme l’évolution vient de l’adaptation à remplir des fonctions biologiques spécifiques. Dans cet essai, je passe en revue et défends la position structuraliste en soutenant qu’un ensemble important de formes biologiques formant des homologies profondes n’a jamais été réduit de façon satisfaisante à des explications fonctionnalistes. Le formalisme pré-DarwinienLa découverte selon laquelle le monde vivant est organisé en une hiérarchie ascendante de classes de plus en plus inclusives, définies chacune par une homologie ou une suite d’homologies particulières, de nature apparemment abstraite, fut l’une des principales réussites de la biologie pré-darwinienne.[11] Bien que la base causale de cette hiérarchie remarquable était inconnue (et l’est encore aujourd’hui), il a été largement admis au début du 19ème siècle que c’était une caractéristique immanente de la nature, faisant partie de l’ordre éternel du monde. Comme Mary Winsor le souligne, tout comme Newton avait fourni une explication causale pour les régularités dans les mouvements des planètes décrites par Kepler, ainsi la biologie finirait-elle par avoir son Newton qui fournirait une explication scientifique pour le modèle hiérarchique de la nature.[12] Comme elle écrivait :”De nombreux biologistes semblent penser que, bien que leur domaine ne soit pas encore aussi exact, cohérent et logique que la science newtonienne, il a le potentiel de le devenir …. Le rôle d’un scientifique était de découvrir, derrière la diversité déroutante des êtres vivants, les lois et l’ordre sous-jacent ». L’idée que la vie sur terre était le résultat d’un processus naturel a été explicitement confirmé par Richard Owen (1866) dans le chapitre de conclusion de son Anatomy of Vertebrates (“L’Anatomie des vertébrés”) quand il a affirmé que le chemin de l’évolution était « réglé d’avance … en raison d’une tendance innée … par laquelle des protozoaires crées selon la nomogénose (« nomogenous”) [ générés par la loi ] se sont élevées vers les formes les plus évoluées. »[13] Et Owen n’était pas une exception. William Carpenter, un des contemporains de Owen, était en accord avec Dov Ospovat qui soulignait dans son Development of Darwin’s Theory (“Développement de la théorie de Darwin”), “que les lois qui définissent le plan de la création étaient … imprimées sur la matière au début, ce qui a entraîné la création de l’univers, la création et la succession de la vie.”[14] Comme le montre Russell dans son classique Form and Function (“Forme et Fonction”), presque tous les biologistes pré-darwiniens – y compris des célébrités telles que Karl Ernst von Baer, Etienne Geoffroy Saint- Hilaire, Henri Milne-Edwards, E. Serres, JF Mekel, Carl Gustave Carus, H.G. Bron, Théodore Schwann -, et de nombreux autres après Darwin, en particulier sur le continent, tel Ernest Haeckel, croyaient que l’ordre global du grand arbre de la vie était le résultat de processus reposant sur des lois,même si celles-ci n’étaient pas encore identifiées.[15] Le concept selon lequel les structures hiérarchiques de la vie reposent sur des lois est également présent dans la tentative des taxonomistes au début du 19ème siècle d’organiser des systèmes de classification en termes de motifs géométriques et numériques tels que le système quinaire de William Sharp Macleay et Swainson.[16] Même Huxley était attiré par ces systèmes circulaires ordonnés et sa remarque comme quoi “le système circulaire me semble avoir le même rapport à la vraie théorie de la forme animale que les lois de Kepler à la doctrine fondamentale de l’astronomie” sert à souligner en outre que l’objectif principal de la biologie au début du 19ème siècle était de trouver des explications des formes biologiques qui reposent sur des lois.[17] Selon les commentaires de Mary Winsor concernant Huxley : “Il n’avait pas trouvé la réponse, la loi de la gravité de la biologie, mais il cherchait dans cette direction”.[18] Même si cela semble être une anomalie dans le contexte de la biologie d’aujourd’hui, profondément mariée comme elle l’est aux notions fonctionnalistes et au concept de la vie comme étant un artefact (voir la section ci-dessous sur le darwinisme), la croyance que l’ordre de la vie était immanent au cœur des choses était au centre du Zeitgeist de la biologie du commencement du 19ème siècle.[19] La ‘Numérologie’ HomologueLa thèse structuraliste selon laquelle les modèles homologues (et le grand système hiérarchique des êtres vivants) sont des caractéristiques immanentes d’un ordre immuable de la nature n’était pas fondée sur une adhésion a priori aux théories aristotéliciennes ou platoniciennes de la nature (voir la section sur l’Essentialisme ci-dessous).[20] Au contraire la position structuraliste était basée sur deux observations fondamentales : que les homologies entre les êtres vivants semblaient être des motifs abstraits non adaptatifs et que, dans certains cas, elles étaient restées invariantes durant des centaines de millions d’années dans diverses lignées. Une expression célèbre d’Owen concernant les homologies était celle de “Motifs Premiers”(“Primal Patterns”) dans son grand classique On the Nature of Limbs (“Sur la Nature des Membres”), ce qui décrit très bien la façon dont il, avec de nombreux autres pré-darwiniens, les voyait : comme des formes ou des types naturels, immuables et essentiels, dont les traits ne sont pas moins “légitimes”, pas moins immuables et pas moins immanents dans leur expression de l’ordre du monde que les atomes ou les cristaux ou tout autre ensemble de formes naturelles. Dans le chapitre quatorze de l’Origine, Darwin décrit un certain nombre de motifs homologues, y compris le bien connu membre pentadactyle des vertébrés (voir la figure 1) : “Quoi de plus curieux que la main d’un homme, formée pour saisir, celle d’une taupe pour creuser, la jambe du cheval, la pagaie du marsouin, et l’aile de la chauve-souris, soient toutes construites sur ??le même forme et incluent des os semblables, dans les mêmes positions relatives ?”[21] Que ces motifs homologues n’ont aucune utilité adaptative spécifique apparente dans les organismes vivants fut admis par Darwin comme par Owen. Selon le commentaire de Darwin dans l’Origine, “Rien ne peut être plus désespéré que de tenter d’expliquer cette similitude de type [les homologies] des membres de la même classe, par l’utilité ou par la doctrine des causes finales [adaptation]. Le désespoir de la tentative a été expressément admis par Owen dans son travail très intéressant The Nature of Limbs ??(“La Nature des Membres”)”.[22] Fig. 1. Homologie : Le Membre Pentadactyle. Affichage des membres de plusieurs espèces de tétrapodes pour illustrer la forme pentadactyle sous-jacente. (De Monroe W. Strickberger, Evolution, (Sudbury, MA : Jones and Bartlett Publishers, 2000). http ://www.pbs.org/wgbh/evolution/library/04/2/l_042_01.html Rien ne souligne le “désespoir” de façon plus évidente que les curieux aspects numériques et géométriques de nombreuses formes homologues. Considérez la « numérologie” bizarre du plan du corps de l’insecte. Le corps de l’insecte est divisé en 3 parties, la tête, le thorax et l’abdomen. Le thorax se compose de trois segments et chacun porte une paire de pattes, six au total. Onze segments peuvent être reconnus dans l’abdomen de la plupart des insectes jeunes et bien que certains adultes – y compris les insectes coléoptères (scarabées) et les hyménoptères (guêpes, abeilles, fourmis, etc.) – en ont moins de onze, aucun insecte n’en a plus de 11. Les pattes de tous les insectes se composent de 5 éléments, à savoir le câble coaxial, le trochanter, le fémur, le tibia, le tarse ; le tarse lui-même est généralement divisé en cinq sous-segments. La bouche de l’insecte, dans toutes les nombreuses espèces différentes, est toujours composée de 4 parties d’avant en arrière - le labre, les mandibules, les maxillaires et la lèvre. Et tous les insectes possèdent deux antennes qui sont des appendices articulés mobiles. [23] La « Numérologie” homologue ne se limite pas aux insectes ou aux membres pentadactyles des vertébrés terrestres. Dans le cas des céphalopodes par exemple les Octopodes (poulpes) possèdent huit tentacules tandis que les Teuthoidea (calmars) en possèdent 10, dont deux sont considérablement plus longues que les 8 autres.[24] Encore une fois les poulpes et les calmars ont deux branchies tandis que d’autres céphalopodes dont le Nautilus en ont 4. Les échinodermes (étoiles de mer et dollars de sable) présentent une symétrie pentamère.[25] Parmi les Cnidaires (méduses, anémones de mer et les coraux), il existe une grande variété de symétries radiales intrigantes.[26] Parmi les Scyphozoaires (méduses), la plupart présentent une symétrie tétramère « ayant leurs parties symétriquement répétées autour de leur axe oral aboral jusqu’au nombre de 4 ou multiples de 4 … [mais certaines espèces] sont construites sur un plan de six et ont une symétrie hexamère.”[27] Encore une fois, parmi les Anthozoaires (anémones de mer et formes polyploïdes liées), les différentes classes se différencient par différents types de symétries radiales et peuvent être classées selon le nombre et la disposition des tentacules et des mésentères et le nombre et la disposition des septa.[28] Une sous-classe (Alcyonaria) possèdent 8 tentacules pennées formant un cercle marginal sur le disque oral et huit mésentères attachés à la gorge.[29] “Les huit tentacules disposées symétriquement et les mésentères donnent au polype ce qui semble être une symétrie radiale octamère.”[30] Une autre sous-catégorie, Zoantharia (les anémones de mer), est subdivisée en une variété de groupes présentant des symétries complexes à six-plis avec des « mésentères en cycles de 6, 12, ou multiples de 6.”[31] Les manuels de zoologie des invertébrés sont remplis d’innombrables autres exemples. Les divisions basiques au sein des vertébrés sont également définies par des formes homologues non moins numériques que celles des invertébrés. Nous avons déjà mentionné les membres pentadactyles des tétrapodes. Parmi les mammifères le nombre de vertèbres cervicales est 7 dans presque tous les ordres placentaires y compris la girafe, la souris, la baleine, l’éléphant et l’humain. La plupart des ordres de mammifères placentaires n’ont pas plus de 44 dents et celles-ci sont subdivisées en molaires, canines pré-molaires (possédant des pointes) et incisives (seuls les cétacés se détachent nettement de cette formule). Et chez tous les mammifères placentaires le cortex cérébral est divisé en six couches de cellules ou de lamelles. InvarianceEn plus de leur caractère abstrait remarquable, l’autre caractéristique frappante des homologies est leur immense stabilité sur des millions de générations et diverses lignes phylogénétiques. Le membre pentadactyle par exemple est d’abord apparue il y a 400 millions d’années et est demeuré essentiellement invariant dans toutes les lignes de tétrapodes depuis. Le plan de la fleur Angiosperme est resté inchangé pendant les 100 millions années qui se sont écoulées depuis la fin du Crétacé, lorsque les premières fleurs sont apparues à la fin du règne des dinosaures. Les caractéristiques qui définissent les insectes et les différents sous-groupes d’insectes comme les fourmis sont également restées constantes durant des millions de générations. La nature abstraite et la profonde invariance des homologies ainsi que les types qu’elles définissent est un fait, un fait biologique simple et direct. Cependant, aussi remarquable que cela puisse sembler – et il est certainement très remarquable de voir les mots que Darwin emploie à leurs propos : “curieux” et “frappant”- c’était alors, au début du 19ème siècle, comme aujourd’hui, un fait basé sur l’observation. Les masques adaptatifs (“Adaptive Masks”)Malgré leur focalisation sur les formes abstraites homologues ni Owen, ni aucun des autres formalistes pré-darwiniens n’ont nié le fait de l’adaptation, ni son importance, mais ils considéraient l’adaptation comme un phénomène périphérique secondaire résultant non de la loi naturelle (ordre venant de l’intérieur), mais des conditions environnementales (un ordre externe qui s’imposait de l’extérieur). Owen a inventé le terme élégant et descriptif de « Masques adaptatifs” pour mettre en évidence leur caractère superficiel et secondaire par rapport aux « Motifs Premiers” (“Primal Patterns”) sous-jacents sur lesquels ils ont été « plaqués » afin de servir diverses fonctions adaptatives.[32] Pendant que les Motifs Premiers étaient vues comme faisant partie de l’ordre immuable et légitime du monde, on estimait que les « Masques Adaptatifs” étaient imposés par diverses nécessités environnementales. Comme Russell (1916) le souligne, Haeckel par exemple distinguait « le Bildungstrieb interne … [force formatrice] … l’effet mécanique de la structure matérielle du cristal ou le germe, de l’adaptation, ou Bildungstrieb externe, [qu’il voyait comme] des modifications induites par l’environnement.”[33] Le point de vue de Goethe était similaire. Goethe affirmait la primauté des modèles formels internes tout en concédant un rôle important mais secondaire à l’adaptation. Comme le commente Gould, « la formation interne agit en tant que source primaire qui doit trouver des conditions externes”[34]. Dans les mots de Goethe : « Là où nous pouvons le mieux observer ce phénomène est dans une espèce de phoque dont l’extérieur a pris de nombreux caractères du poisson [forme adaptative] tandis que son squelette [structure formelle] représente encore le quadrupède parfait. »[35] L’adaptation à l’environnement était également considérée par H.G. Bron comme l’un des principaux facteurs de causalité déterminant les formes organiques extérieures.[36] La Métaphore du CristalCompte tenu de l’état d’esprit de la biologie pré-darwinienne qui se centrait sur la notion de loi et de la nature abstraite et énigmatique des homologies et de leur invariance parmi tant d’organismes différents et à travers des périodes de temps si vastes, les considérer comme des formes naturelles immuables analogues à des cristaux ou des atomes, ne représentait qu’une petite étape à franchir. Geoffroy, peut-être le plus grand structuraliste d’Europe continentale, estimait que les homologies avaient des “pouvoirs” analogues aux atomes et autres éléments immuables du monde physique.[37] Owen utilisait également sans ambiguïté l’analogie du cristal dans le dernier chapitre de son Anatomy of Vetebrates (“Anatomie des Vertébrés”) (1866) dans le contexte d’une discussion sur les causes de la segmentation : « La répétition de segments similaires dans une colonne vertébrale et des éléments similaires dans un segment vertébral, est analogue à la répétition de cristaux similaires”. La métaphore a également été utilisée par Théodore Schwann le co-fondateur de la théorie cellulaire. Dans le dernier chapitre de ses Microscopical Researches (“Recherches Microscopiques”) il tisse de nombreux parallèles entre les cellules et les cristaux : Le processus de cristallisation dans la nature inorganique … est … l’analogue le plus proche à la formation des cellules … ne devrions-nous donc pas y trouver un support à l’idée que la formation des parties élémentaires des organismes n’est rien de plus qu’une cristallisation, et l’organisme rien de plus qu’un agrégat de ces cristaux … si un certain nombre de cristaux capables d’imbibition [absorption] sont formés, ils doivent se combiner selon certaines lois de manière à former un ensemble systématique, semblable à un organisme.[38] La métaphore était largement utilisée par Haeckel qui, faisant écho à Schwann, parle de « cellules sous forme de cristaux organiques, d’arbres de cristal, de l’analogie entre l’assimilation par la cellule et la croissance des cristaux dans un liquide mère.”[39] Remarque : le fait que de nombreuses formes différentes de cristaux peuvent être générées à partir d’un petit nombre de motifs de base s’ajoutait à l’attraction de l’analogie. Dans le cas de la calcite, par exemple, les règles permettent la construction d’environ 600 arrangements moléculaires différents pouvant être combinés pour construire plus de 2000 combinaisons différentes.[40] Estimant que les homologies étaient des caractéristiques légitimes de l’ordre du monde tout autant que les atomes ou les cristaux, les biologistes pré-darwiniens ont cherché à fournir une explication rationnelle de la diversité des formes organiques en termes de ‘ Lois des Formes Biologiques.’[41] Tout comme aujourd’hui nous expliquons rationnellement la diversité des formes inorganiques tels que les atomes, les cristaux, les composés chimiques, et même les particules subatomiques – par différents ensembles de lois ou règles de construction – les règles de construction de l’atome, les lois de la cristallographie, les lois de la chimie et ainsi de suite – ce qui autorise une dérivation déductive rationnelle de tous les atomes, cristaux, composés chimiques, particules subatomiques etc. possibles. Typique de la recherche de ces lois qui leur échappaient était la tentative de C.G. Carus, H.G. Bronn et E. Haeckel à développer ce que Russell nommait une morphologie « théorique” des êtres vivants, à la manière de la morphologie des cristaux avec leurs seize types possibles.”[42] Histoire de l’EssentialismeIl ne fait aucun doute que l’impression répandue actuellement selon laquelle les structuralistes pré-darwiniens tiraient leur conviction que les modèles homologues étaient des formes naturelles immuables ou des types (comparables à ceux des cristaux ou des atomes) de toutes sortes de croyances métaphysiques discréditées a été sévèrement critiquée par des chercheurs au cours de ces dernières années. Ils ont également montré qu’une grande partie de ce mythe a été créé par les défenseurs de la synthèse évolutionniste néo-darwinienne au 20ème siècle.[43] Comme le démontre Amundson, quelle que soit leur penchant métaphysique, la notion de type en tant que forme naturelle de base ne provenait pas de théories a priori de la nature (morphologie idéaliste, anatomie transcendante, essentialisme, platonisme, créationnisme, etc.), mais d’observations empiriques solides. Comme il le dit : “Ils ne méritent pas le mépris dont ils ont si longtemps fait l’objet … Nous n’allons pas plus nous inquiéter de leur métaphysique que de celle de Kepler.”[44] La conception structuraliste de la vie, et en particulier celle d’une hiérarchie ascendante de types comme étant une caractéristiques de la nature, était proche de la vision aristotélicienne classique du monde, mais elle était basée sur des faits et non sur un a priori philosophique. La biologie des « Lois de la Forme” de l’ère pré-darwinienne, mettant l’accent sur ??l’évolution par loi naturelle et concevant un ordre rationnel qui sous-tend la diversité de la vie, représentait une vision scientifique grandiose dont le but héroïque n’était rien de moins que l’unification de la biologie et de la physique. Cette vision s’est effondrée, principalement parce qu’elle n’a pas réussi à identifier les lois qui auraient pu fournir une explication rationnelle des structures des êtres vivants et expliquer comment l’évolution des types de base aurait été générée par les lois naturelles, à partir de formes cellulaires comme au niveau des plans du corps des phylas principaux et des homologies profondes comme les membres pentadactyles des vertébrés terrestres.[45] Le fait qu’ils n’avaient pas d’explication convaincante a été explicitement reconnu par Owen dans le dernier paragraphe de On the Nature of Limbs (“Sur la Nature des Membres”) (1849) : “Nous ignorons encore quelles sont les lois ou les causes secondaires de la succession naturelle et de la progression de ces phénomènes organiques ». La révolution darwinienneL’échec à trouver les lois qui représenteraient les structures de base du monde biologique et expliqueraient le cours de l’évolution a ouvert la porte à Darwin et a marqué le début de la révolution fonctionnaliste. Après 1859, la conception structuraliste de l’ordre de base du domaine biologique en tant que produit de la loi naturelle a été renversée et avec elle le concept pré-darwinien selon lequel les organismes étaient des formes naturelles, des parties nécessaires du tissu éternel de l’ordre du monde comme le sont les atomes ou les cristaux. Un nouveau modèle de la structure des êtres vivants – celui de la machine ou de l’object – a pris sa place.[46] La nécessité a été remplacée par la contingence et la loi naturelle par la sélection naturelle. Les formes organiques étaient maintenant considérées comme des assemblages contingents et mutables de la matière, comme les constructions montées par l’enfant selon un Lego, mis en place au cours de l’évolution par la sélection naturelle, pièce par pièce. L’adoption de l’objet contingent mutable comme métaphore de la structure des êtres vivantsa inauguré l’ère moderne de la biologie et a changé l’ensemble du cadre explicatif de la science biologique, passant d’un cadre structuraliste / fonctionnaliste (où les « motifs premiers » abstraits proviennent des lois et les « masques adaptatifs » secondaires de la sélection environnementale) à une conception purement fonctionnaliste de la nature. L‘idée que la vie était inscrite dans les lois de la nature, qu’elle était une partie nécessaire de la nature, a été abandonnée. La métaphore du cristal a été remplacée par celle de la montre! [47] LégitimationsMais si le fonctionnalisme souhaite fournir un cadre explicatif exhaustif de l’ordre biologique ENTIER, il doit être capable de rendre compte de façon plausible, non seulement de la complexité adaptative, mais aussi de l’existence d’un ordre non-adaptatif donc des homologies apparemment afonctionnelles qui sous-tendent l’ensemble du système naturel. L’explication de Darwin est qu’elles représentent des ‘restes’ de l’évolution ; des adaptations anciennes qui ne sont plus utiles mais qui sont intégrées dans le système génétique et transmises à travers les générations.[48] Darwin a donné cette explication à l’existence de formes persistantes qui n’ont pas d’utilité adaptative apparente dans de nombreux endroits de l’Origine des espèces : La partie principale de l’organisation de tous les êtres vivants est due à l’héritage, et par conséquent même si chaque être est bien équipé pour sa place dans la nature, de nombreuses structures n’ont aucune relation proche et directe avec ses habitudes présentes de vie. Nous ne pouvons pas croire que les os similaires dans le bras d’un singe, dans l’avant-jambe du cheval, dans l’aile d’une chauve-souris, et dans la nageoire du phoque, soient d’une utilité particulière à ces organismes. Nous pouvons attribuer en toute sécurité ces structures à l’héritage.[49] [Je souligne] Si l’on suppose qu’un ancêtre – l’archétype comme il peut être appelé – de tous les mammifères, les oiseaux et les reptiles, avait ses membres construits sur le modèle général existant, à quelques fins que ce soit, nous pouvons alors aussitôt percevoir la signification ordinaire de la construction homologue des membres dans l’ensemble de la classe. [50] [Je souligne] De toute évidence ‘l’explication’ de Darwin est plus une affaire de plaidoyer particulier qu’une “explication”. D’une part, il admet avec Owen que les homologies ne servent en rien l’adaptation (voir la discussion ci-dessus), mais est prêt à spéculer qu’elles avaient autrefois servies à quelque chose dans une forme ancestrale. Mais il ne tente nulle part dans l’Origine de fournir une justification significative pour cette revendication radicale, en montrant par exemple que cinq doigts étaient le résultat d’une adaptation chez un ancêtre des tétrapodes, ou que les trois segments thoraciques étaient le résultat d’une adaptation chez un ancêtre de insectes. Compte tenu de leur caractère numérique et géométrique, montrer que les homologies étaient autrefois les résultats d’adaptations, constitue un défi herculéen pour la théorie fonctionnaliste. En outre, dans le chapitre 6 de l’Origine il concède que « beaucoup de structures n’ont maintenant aucune utilité directe pour leurs possesseurs, et n’ont peut-être jamais été d’aucune utilité pour leurs ancêtres”- une concession qui compromet largement sa position. Considérons l’origine des membres pentadactyles des vertébrés terrestres. Pour fournir une explication strictement fonctionnaliste de l’origine de ce modèle Darwin aurait eût à donner une explication adaptative pour chaque élément du motif; expliquer pourquoi cinq doigts ont été préférés à 4 ou à 6 ? Pourquoi deux os distaux ont été préférés à 1 ou 3 ou 4 et un os proximal plutôt de 2 ou 3 ? En fin de compte, nous n’avons pas d’explication. S’ils étaient le résultat d’adaptations dans les espèces ancestrales nous ne pouvons pas imaginer pourquoi ! En outre, les membres antérieurs et postérieurs sont basés sur le même schéma homologue. Brian Goodwin commente : “Compte tenu de la diversité des utilisations on aurait pu s’attendre à ce que la sélection naturelle eusse conçu chaque membre de façon à servir ses fonctions de façon optimale. »[51] Pourquoi est-ce que des pressions sélectives sur un membre antérieur et postérieur – pressions différentes dans CHACUNE des espèces à membres – auraient miraculeusement généré la même forme fonctionnelle, à la fois dans le membre arrière et dans le membre avant d’une espèce ancestrale mystérieuse ? Nous faisons face à des problèmes similaires lorsqu’il s’agit de rendre compte de la portée adaptative spécifique de TOUT l’univers des motifs homologues dans la nature.[52] Figure 2. Coquilles de radiolaires du Kunstformen der Natur (“Formes artistiques de la nature”) d’Ernst Haeckel, 1904.Mais même si nous pouvions expliquer l’origine de ces modèles de toute évidence numériques en termes d’adaptation nous sommes alors confrontés à un problème supplémentaire et beaucoup plus difficile à expliquer, à savoir comment la sélection pour la fonction aurait pu conserver le modèle durant des millions de générations alors qu’il a cessé d’avoir une quelconque signification adaptative. Considérons : Pour accepter la légitimation de Darwin nous devons supposer qu’une nageoire – plus précisément l’agencement des os dans une nageoire de poisson – ait subit des changements adaptatifs progressifs supervisé par la sélection de sorte que peu à peu le modèle approchait puis finalement aboutit à la configuration finale du modèle des membres pentadactyles. Bien que ce processus soit relativement plausible la prochaine phase qui implique le gel du modèle pentadactyle est hautement problématique. Nous devons croire qu’une forme adaptative variable est devenue une forme non-adaptative invariante à un moment précis dans le temps de l’évolution et que celle-ci a été conservée sans changement ultérieur, à travers toutes les générations et lignes phylogénétiques suivantes. L’ubiquité de motifs non-adaptatifsUn défi particulièrement difficile pour les hypothèses à la fois darwiniennes et fonctionnalistes soutenant que les homologies profondes étaient adaptatives dans leurs formes ancestrales ( hypothèse essentielle si la sélection doit être, comme l’affirmait Darwin, le moteur de l’évolution) est l’existence dans la nature d’un vaste univers de formes non-adaptatives et de motifs qu’aucun biologiste, même pas le plus convaincu des fonctionnalistes ou des darwinistes, n’a jamais reconnu comme étant fonctionnel. Cela soulève le problème évident de savoir sur quelles bases des formes homologues comme les membres pentadactyles des vertébrés terrestres peuvent-elles être différenciées de la multitude de formes dont il ne fait aucun doute qu’elles soient non-fonctionnelles. Pour prendre un exemple, les coquilles des radiolaires, y compris les organismes unicellulaires, les diatomées et formanifera (voir la Figure 2) montrent un univers déconcertant de diverses formes, certaines très géométriques mais d’autres aussi abstraites que la peinture de Kandinsky. Que nombreuses de ces formes soient des structures abstraites produites par l’action directe des lois de la physique, de même que la forme généralement ronde d’une cellule, a été merveilleusement soutenu dans On Growth and Form de D’Arcy Thompson.[53] Comme le fait valoir Thompson : Les forces qui engendrent la sphère, le cylindre ou l’ellipsoïde sont les mêmes que celles d’hier et de demain. Un cristal de neige est le même aujourd’hui que lorsque les premières neiges sont tombées. Les forces physiques qui modèlent les formes d’Orbulina, d’Astrorhiza, de Lagena ou de Nodosaria aujourd’hui étaient déjà les mêmes, et nous avons des raisons de croire que les conditions matérielles sous lesquelles elles travaillaient n’étaient pas sensiblement différentes dans ce passé que nous appelons le Crétacé. [54] Gould commente : « Ces formes [de radiolaires et de foraminifères] ne sont … pas plus … soumises à des processus spécifiques de filiation historique que ne le sont les formes variées des flocons de neige ou des cristaux de quartz”.[55] Mais ce n’est pas seulement dans le monde unicellulaire que la nature regorge de modèles formels abstraits. Même en observant rapidement les formes de vie et les modèles de la nature, ceux qui pourraient être observés dans un jardin de banlieue par exemple, il est évident qu’une grande quantité des formes biologiques est d’origine non-adaptative. Dans le contexte d’un ensemble de formes non-adaptatives qui imprègnent toute la nature, l’hypothèse de Darwin que les homologies étaient adaptatives dans leurs formes ancestrales est ad hoc. En d’autres termes : Darwin n’a pas réussit à justifier sa grande revendication comme quoi TOUTE la complexité en biologie (y compris toutes les formes actuellement non-adaptatives) provient d’un passé où les structures ont été façonnées et mises en forme à des fins fonctionnelles par l’adaptation. Pour résumer : quelle que puisse être l’explication des homologies profondes qui unissent chacun des principaux taxons dans le système naturel et à savoir si elles sont en effet générées par les lois de la forme comme les coquilles des radiolaires le sont sans aucun doute, il est certain que ni Darwin ni aucun darwinien par la suite, n’a jamais fourni une explication fonctionnaliste convaincante. Néanmoins, depuis Darwin, la biologie a été étroitement mariée à priori à une conception fonctionnaliste / adaptative de la nature vivante et a évité de se confronter au défi selon lequel la majorité de l’ordre de la nature était peut être fondamentalement non-adaptatif et au-delà de toute explication fonctionnaliste, même de principe.[56] Donc les biologistes darwiniens se conformant à la priorité du paradigme préfèrent regarder ailleurs. L’existence d’un ordre non-adaptatif est le grand fléau, le talon d’Achille de toute la tradition fonctionnaliste. Acceptez les modèles structurels comme étant les faits principaux de la biologie, comme les phénomènes premiers à expliquer, et le darwinisme devient une théorie secondaire expliquant seulement l’adaptation et rien de plus. Soutien récent pour le StructuralismeLe Structuralisme a été largement mis à l’écart dans le monde anglophone depuis la révolution darwinienne, mais il a refusé de mourir. Au contraire, ces cinquante dernières années, plusieurs développements ont fourni un nouveau soutien à l’idée pré-darwinienne de la vie et de ses structures profondes comme étant immanentes à l’ordre du monde. Tout d’abord il y a la découverte des coïncidences anthropiques qui impliquent que les lois de la nature sont réglées pour la vie telle qu’elle existe sur la terre, d’autre part, il y a la révolution de la biologie moléculaire qui a révélé que bon nombre des constituants de base de la cellule sont des formes naturelles déterminées par les lois de la nature, c’est à dire des structures formelles ; et troisièmement, les découvertes en biologie du développement ont fourni un soutien supplémentaire confirmant la robustesse du développement de modèles homologues. Le réglage du Cosmos pour la vie Comme de nombreux astronomes et physiciens l’ont récemment souligné, les progrès de la physique et de l’astronomie du 20ème siècle ont révélé que la vie telle qu’elle existe sur la terre dépend d’un réglage particulier des lois fondamentales de la physique donnant l’impression que celles-ci ont été spécialement conçues pour générer un cosmos spécifiquement adapté à la vie.[57] Si les différentes forces fondamentales et constantes qui déterminent la structure du cosmos et les propriétés de ses constituants n’avaient pas exactement les valeurs qu’elles ont il n’y aurait pas d’étoiles, pas de supernovas, pas de planètes, pas d’atomes, pas de vie. Comme Paul Davies le résume : « Les valeurs numériques que la nature a attribué aux constantes fondamentales, telles que la charge de l’électron, la masse du proton, et la constante de la gravitation newtonienne, peuvent être mystérieuses, mais elles sont essentielles pour que la structure de l’univers soit celle que nous connaissons. Alors que de plus en plus de systèmes physiques, du cœur des cellules aux galaxies, sont mieux compris, les scientifiques ont commencé à se rendre compte que les nombreuses caractéristiques de ces systèmes sont remarquablement sensibles aux valeurs précises des constantes fondamentales. Si la nature avait choisit un ensemble légèrement différent de nombres, le monde serait un endroit très différent. Nous ne serions probablement pas ici pour le voir. Plus intriguant encore, certaines structures essentielles comme les étoiles de type solaire dépendent pour leurs caractéristiques d’un ensemble improbable d’accidents numériques combinant des constantes fondamentales appartenant à des branches distinctes de la physique. Et lorsque l’on étudie la cosmologie – la structure générale et l’évolution de l’univers – l’incrédulité croît. Des découvertes récentes sur le cosmos primitif nous obligent à accepter que l’univers en expansion ait été mis en place dans son mouvement avec une précision étonnante.[58] » Et l’aptitude du cosmos pour la vie ne s’arrête pas à la simple vie microbienne, elle s’étend même à des organismes plus élevés comme nous.[59] Cette nouvelle preuve révolutionnaire est certainement compatible avec la conception pré-darwinienne de la vie comme immanente à l’ordre du monde; avec la conception d’Owen que « les protozoaires créé par nnomogénose (“nomogenously”) [générée par la loi] se sont élevées vers les formes les plus évoluées »[60] et avec l’idée répandue que les principaux taxons étaient des universaux invariants analogues aux atomes ou aux cristaux. Si les lois de la nature sont, pour une raison quelconque, miraculeusement affinées pour générer des conditions environnementales qui conviennent parfaitement aux formes de vie qui existent sur ??la terre, il n’est pas scandaleux d’envisager qu’elles pourraient également être affinées pour générer la grande hiérarchie des formes elles-mêmes. Typologie moléculaireUn autre développement important au cours des dernières décennies a été la révélation qu’à un niveau moléculaire, la plupart de l’ordre fondamental de la vie surgit de l’auto-organisation de la matière et NON de la sélection naturelle. Même l’icône de la biologie moléculaire, la double hélice elle-même, est sans aucun doute une forme naturelle déterminée dans toute sa géométrie exquise par les lois de la chimie et de la physique. Elle remplie peut-être l’une des plus importantes fonctions biologiques, mais sa structure et ses propriétés viennent des propriétés d’auto-organisation de la matière, et non de la sélection d’une quelconque fonction. Tant sa structure en double hélice que sa stabilité chimique lui conférant une telle aptitude merveilleuse[61] pour son rôle génétique sont déterminées par la loi naturelle. Au cours des années 1960, la structure de deux autres formes biologiques importantes provenant de l’auto-organisation fut élucidée – les 1000 plis des protéines[62] et la membrane bicouche lipidique qui forme la limite externe de toutes les cellules vivantes (et la membrane reliant la plupart des organelles importantes dans la cellule, y compris le noyau et les mitochondries).[63] Les 1000 reploiements des protéines sont aussi comme la double hélice, déterminés par la loi naturelle, et représentent un ensemble de formes naturelles. On sait maintenant que leurs formes se présentent comme celle de la double hélice à partir des propriétés d’auto-organisation de la matière.[64] Curieusement les règles qui génèrent les formes de protéines ont été en grande partie élucidées et elles peuvent remarquablement se résumer à un ensemble de “lois des formes” de la nature précisément de celles recherchées par les premiers structuralistes du 19ème siècle (voir ci-dessus).[65] En conformité avec le structuralisme pré-darwinien les formes protéiques sont remarquablement analogues à un ensemble de cristaux ![66] Et tandis que toutes les protéines présentent des modifications adaptatives, celles-ci sont clairement des “Masques Adaptatifs” construits sur une forme sous-jacente invariante ou ‘Motif Premier’. Dans le cas de la membrane bicouche lipidique, il est encore évident que sa forme de base provient spontanément des propriétés physiques de ses constituants de base. Les membranes lipidiques forment une vaste variété de tubes, vésicules et différents types de feuilles. Toute cette diversité de formes survient spontanément par auto-organisation à partir des propriétés physiques des diverses membranes bicouches lipidiques de composition chimique différente.[67] Robustesse du développementNous savons depuis les études extraordinaires de Trembly d’Abraham au 18ème siècle sur la régénération d’Hydra que l’on peut arriver aux formes natives des organismes par plusieurs voies différentes. Dans son livre classique défendant le vitalisme, Driesch cite de nombreux cas.[68] Selon les commentaires d’Amundson : « Les organes régénérés sont clairement homologues à ceux initialement développés dans les embryons, mais ils sont construits d’une autre façon et prennent leurs sources dans des tissus différents ».[69] Cela veut dire qu’au moins dans les mêmes espèces, les structures homologues ou ensembles sont plus robustes et invariants que leurs parties ou que les processus variables de développement par lesquels elles émergent, ce qui a toujours apporté un soutien à la notion structuraliste que les homologies sont des formes naturelles robustes et stables. Fig. 3. Deux façons de faire un insecte. Illustrant la façon dont les segments sont générés dans les embryons par la bande germinale courte et la bande germinale longue [NdT : la « bande germinale » se définit par l’extension de l’ectoderme ventral lateral dans l’étude de l’extension épithéliale]. Dans le cas des insectes à bande germinale courte les segments sont générés de manière séquentielle (A, B et C). Dans le cas des insectes à bande germinale longue les segments sont générés simultanément. Dans les embryons à bande germinale longue un gradient de morphogène est mis en place dans l’embryon (A). Ce gradient détermine l’expression de divers ”gènes segmentaires”, y compris les ‘gènes de règle paire’ (B), puis les ‘gènes de polarité segmentaire’ (C). Le résultat final de ces deux systèmes générateurs est le même motif de segment (D).D’après I. Salazar-Ciudad, R.V. Sole, S.A. Newman (2001) ”Phenotypic and dynamical transitions in model genetic networks II. Application to the evolution of segmental mechanisms” (“Transitions phénotypiques et dynamiques dans le modèle des réseaux génétiques II. Application à l’évolution des mécanismes segmentaires”), Evolution and Development 3 :2, 95–103. Il est également évident depuis de nombreuses années, grâce à des études comparatives, que la même structure homologue peut se former de différentes manières dans des espèces différentes. Pour prendre un exemple classique : les premiers embryons de tous les vertébrés sont très semblables à l’étape post-gastrula lorsque le plan du corps des vertébrés est apparent, mais les processus de développement et les voies qui mènent à ce stade homologue diffèrent sensiblement dans les différentes classes. Ou encore chez les coléoptères : bien que le modèle de segmentation de tous les coléoptères adultes soit les mêmes trois segments thoraciques, et les 11 segments abdominaux, trois mécanismes générateurs différents sont utilisés pour générer les segments dans les différentes espèces de coléoptères,[70] qui sont est appelé la bande germinale courte, la bande germinale intermédiaire, et la bande germinale longue.[71] Dans le mécanisme de la bande germinale longue la totalité du motif de segmentation antérieur-postérieur est déterminé simultanément dans l’embryon alors que dans la bande germinale courte les segments successifs sont générés par subdivision successive d’une zone de croissance postérieure (voir figure 3). Dans un cas la séquence spatiale est formée en même temps alors que dans l’autre la séquence spatiale est aussi une séquence temporelle. De nombreux autres exemples pourraient être cités. Comme le dit Amundson : « Les caractères homologues n’apparaissent pas toujours à des moments identiques dans l’ontogenèse, ou ne se développent pas à partir des mêmes précurseurs embryonnaires ou d’identiques couches germinales, ou ne reflètent pas l’expression des mêmes gènes. Des informations provenant de l’anatomie, de l’embryologie et de la génétique peuvent donner des réponses inconsistantes quand on essaie de déterminer l’homologie d’un caractère.”[72] À la suite de récents progrès en biologie du développement au cours des deux dernières décennies (qui ont conduit à la découverte des gènes homéobox, – ou boîte homéotique – des circuits génétiques et au lancement du nouveau champ de la biologie évolutive du développement, appelé evo-devo),[73] nous en savons maintenant beaucoup sur les processus génétiques qui sous-tendent le développement de ces homologies classiques comme les membres pentadactyles ou le plan du corps de l’insecte dans différentes espèces. Ces nouvelles connaissances n’ont pas fourni de soutien à des hypothèses fonctionnalistes et cela devient évident avec le scepticisme très répandu exprimé à l’égard du darwinisme dans les milieux evo-devo.[74] Au contraire, il a été révélé de nombreux nouveaux exemples de la stabilité des homologies face aux différents processus génératifs dans différentes espèces fournissant un soutien supplémentaire à l’idée que les homologies sont des structures naturelles robustes et stables. Comme Günter Wagner (une sommité dans le domaine de la biologie du développement) commente, Les Voies etmécanismes du développement ont tendance à changer alors que les types issus du développement sont les mêmes. La machinerie génétique qui produit des segments dans les sauterelles est à bien des égards différente de celle d’une mouche du vinaigre. Les gènes qui sont essentiels pour la segmentation de la mouche du vinaigre ne sont même pas exprimés dans les sauterelles, par exemple, ils sont ignorés[75]. [Je souligne] Pour résumer : il est maintenant clair que non seulement les structures homologues peuvent être atteintes de différentes manières dans les mêmes espèces, mais aussi par des mécanismes de développement différents dans différentes espèces. Il a toujours été apparent que les adaptations construites sur les homologies (comme les divers membres vertébrés construits sur le modèle pentadactyle sous-jacent) sont bien plus variables que les homologies sous-jacentes elles-mêmes. Il est maintenant clair que dans de nombreux cas les motifs homologues sont aussi plus robustes et stables que les processus qui les génèrent et que les circuits génétiques qui les assemblent au cours du développement. C’est vraiment remarquable. Il existe des variations au dessus (les différentes formes d’adaptation construites sur l’homologie des espèces différentes) et des variations au dessous (les processus génératifs variables par lesquels le motif homologue est produit dans le développement d’espèces différentes), tandis que le motif homologue lui-même reste invariant dans les espèces où il est manifeste ! Agissant comme des ‘attracteurs étranges’, les homologies exercent une influence mystérieuse sur la bio-matière dans laquelle elles se forment. Quelle que soit la raison de leur curieuse robustesse, il ne fait aucun doute à présent que comme l’admet Wagner : « il n’y a toujours pas d’explication pour la stabilité des motifs du développement …. [Donner une explication est] le problème théorique le plus urgent dans l’unification du développement et de l’évolution.”[76] [Souligné par moi]. Pris dans leur ensemble, l’étrange aptitude des lois de la nature pour la vie telle qu’elle existe sur la terre révélée par les progrès de la cosmologie et de la physique fondamentale du 20ème siècle, la révélation par la révolution de la biologie moléculaire du milieu du 20ème siècle que les nombreuses et principales formes moléculaire et cellulaire sous-jacentes à toute vie sont purement des formes naturelles (structures formelles) résultant de l’auto-organisation de la matière, les progrès récents en biologie du développement montrant que les homologies profondes ont une robustesse de développement, c’est à dire, sont stablesface à l’instabilité de leurs mécanismes générateurs, appuient fortement la vue structuraliste. Toute validation finale de la position structuraliste ne viendra qu’avec de nouveaux progrès dans les connaissances biologiques en particulier dans le domaine de la biologie cellulaire et du développement. Mais si l’on considère cette convergence d’éléments nouveaux probants dans le contexte du caractère numérique et géométrique étonnamment abstrait des homologies et l’échec des fonctionnalistes depuis 200 ans – y compris de Darwin lui-même – à fournir une explication quelle qu’elle soit pour leurs origine et stabilité en termes fonctionnalistes, la possibilité que le structuralisme se révélera être bien plus que juste un concurrent actuel formidable au paradigme pan-sélectionniste ne peut être écartée, car il est à même de fournir un cadre explicatif global plus cohérent de l’ordre de la vie et en particulier de la grande ‘hiérarchie homologique’ qui sous-tend le système naturel. La métaphore du cristal peut encore éclipser la métaphore de la montre. Un Echo d’AristoteLa validation de la position structuraliste – le fait que les formes de vie sont immanentes dans la nature et arrangées dans une hiérarchie ascendante de formes de plus en plus inclusives – porterait non seulement gravement atteinte à la revendication darwinienne que la sélection est le moteur créatif de l’évolution, mais aurait aussi de profondes implications philosophiques touchant à de nombreux autres domaines de la pensée. Un résultat intéressant serait le soutien qu’une telle validation apporterait à la philosophie naturelle d’Aristote. La notion structuraliste que la nature se compose fondamentalement d’une hiérarchie ascendante immanente de formes naturelles est presque ‘purement Aristotélienne’. Comme le montre Hans Jonas dans son classique The Phenomenon of Life (“Le phénomène de la vie”), le système aristotélicien classique du monde était un ensemble fait d’ensembles de plus en plus exhaustifs, culminant dans le cosmos lui-même, l’ultime embrassant tout, le suprême “Un dans le Nombreux” pour sa propre fin.[77] L’accord avec les conceptions structuralistes est évident. En outre, la robustesse des homologies – leur invariance dans le temps ainsi que face à la variation de leurs parties et processus génératifs – est conforme à leur nature d’ensembles naturels possédants, dans les mots de Jonas, une “totalité comme cause autonome par rapport à [leurs] composants et ainsi le terrain de [leur] propre devenir”, ceci à nouveau est du pur Aristote.[78] Car, comme le souligne Jonas, la primauté du tout sur ses parties était une partie intégrante de la vision classique du monde : « Tout l’esprit de la philosophie naturelle grecque … résidait sur ??des structures complètes de forme, donnant un statut d’autonomie à leurs ‘entièreté’.”[79] Jonas, qui comme un aristotélicien convaincu acceptait la primauté des ensembles sur leurs parties, était opposé à l’approche réductionniste de la science moderne qui, depuis Descartes et Newton, a vu le principal objectif de la science comme étant de fournir des explications de la nature en termes de particules et de forces fondamentales, en supposant que les ordres supérieurs des structures biologiques, y compris les êtres humains, sont des épiphénomènes – simples combinaisons accidentelles de processus de niveaux inférieurs. La possibilité d’un structuralisme (ou formalisme) revigoré aurait donc beaucoup plu à Hans Jonas car cela représenterait une première étape importante vers une nouvelle synthèse aristotélicienne, éloignée du réductionnisme de la science moderne. [1] Dans John W. Keck, James Barham, eds. Hans Jonas and the Rediscovery of Nature (“Hans Jonas et la redécouverte de la nature”). Accepté pour publication par University Press of America (2010). [2] Stephen J. Gould (2002) The Structure of Evolutionary Theory (“Structure de la théorie évolutionniste”), (Cambridge, Mass. : Harvard University Press), 252. [3] Stephen J. Gould (1990) Causes of Evolution (“Causes de l’évolution”), eds. R.M. Ross and W.D. Allmon (Chicago : University of Chicago Press), Foreword (“Avant-propos”). [4] Stephen J. Gould (2002) The Structure of Evolutionary Theory (“Structure de la théorie évolutionniste”), (Cambridge, Mass : Harvard University Press), voir ch 4 et 5. [5] Voir les commentaires de Stephen J. Gould (1995) sur la publication de Brian Goodwin ‘Biology Is Just a Dance’ (“La biologie est juste une danse”) dans The Third Culture : Beyond the Scientific Revolution, ed. John Brockman (NY : Simon & Schuster), ch. 4. (le texte du chapitre 4 est disponible en anglais sur http ://www.edge.org/documents/ThirdCulture/k-Ch.4.html) [6] Ibid. [7] D’Arcy W. Thompson (1942) On Growth and Form, (Cambridge : Cambridge University Press). [8] Rupert Riedl (1978) Order in living organisms : A systems analysis of evolution (“Ordre dans les organismes vivants : Une analyse systémique de l’évolution”), (New York : Wiley). [9] B.C. Goodwin (1994). How the Leopard Changed its Spots (“Comment le Léopard a changé ses taches”), (London : Weidenfeld & Nicholson). Brian Goodwin (1995) “Biology Is Just a Dance” (« La biologie est juste une danse”) dans The Third Culture : Beyond the Scientific Revolution, ed. John Brockman (NY : Simon & Schuster), ch 4. [10] Stuart A. Kauffman (1993) The Origins of Order (“Les origines de l’Ordre »), (Oxford : Oxford U. Press). [11] R. Amundson (2005) The Changing Role of the Embryo in Evolutionary Thought (“L’évolution du rôle de l’embryon dans la pensée évolutionniste”), (Cambridge : Cambridge University Press), ch. 2; D. Ospovat (1981) The Development of Darwin’s Theory (“Le développement de la théorie de Darwin”), (Cambridge : Cambridge University Press), 20, see ch. 1; et M.P. Winsor (1976) Starfish Jelly Fish and the Order of Life, (New Haven : Yale University Press). [12] Winsor (1976), 175. [13] Owen R (1866) Anatomy of Vertebrates (“Anatomie des vertébrés”), (London : Longmans and Green). [14] Ospovat (1981), 20. [15] E.S. Russell (1916) Form and Function (“Forme et fonction”), (London : John Murray). [16] Amundson (2005), 45–47. Voir l’article de Wikipedia, http ://en.wikipedia.org/wiki/Quinarian_system. [17] Winsor, op. cit., 91. [18] Ibid. [19] Voir Ospovat op. cit.; Winsor (1976). [20] M.P. Winsor (2003) “Non-Essentialist methods in Pre-Darwinian taxonomy” (“Les méthodes non-essentialiste de la taxonomie pré-darwinienne”), Biology and Philosophy 18 : 387-400. Amundson, op. cit., p. 11. [21] C. Darwin (1972) The Origin of Species, 6th edition (“L’origine des espèces” 6ème édition), (London. : Murray), ch. 14. [22] Ibid., ch. 14. [23] A.D. Imms (1957) A general Textbook of Entomology (“Un manuel général d’entomologie”), 9e édition (Londres : Methuen). [24] R.R. Shrock aand W.H. Twenhofel (1953) Principles of Invertebrate Paleontology (“Principes de paléontologie des invertébrés.”). (New York : McGraw-Hill), ch. 10, 485. [25] Ibid, voir ch. 14. [26] Ibid, voir ch. 10, 485. [27] Ibid.. 116. [28] Ibid., 125. [29] Ibid. [30] Ibid. [31] Ibid., 130 [32] Owen, On the Nature of Limbs (“sur la Nature des Membres”). [33] Russell, op. cit., 248. [34] Gould, op. cit., 289. [35] Ibid, 289-900; Goethe (1790) 2nd essay on Plant metamorphosis (“2ème essai sur la métamorphose des plantes”), dans Muller et Engard (1952), 83. [36] Russell, op. cit., 203. [37] Ibid., 78 [la citation originale dans Mém. Acad. Sci, xii. (1833), p. 76]. [38] T. Schwann (1847) Microscopical Researches (“Recherches Microscopiques”). Henry Smith. Original publié en allemand en 1839. (Londres : Sydenham Society). [39] Russell, op. cit., 248. [40] A. Lima-de-Faria, (1988) Evolution without Selection (“Evolution sans sélection”). (New York : Elsevier). pp 78-79. [41] G. Webster et B.C. Goodwin (1982) “The origin of species: a structuralist approach.” (“L’origine des espèces : Une approche structuraliste”). J. Social Struct. 5, 15-47; et H. Driesch (1929) The Science and Philosophy of the Organism (“La science et la philosophie de l’organisme »), (London : A. and C. Black). [42] Russell op. cit., 33. [43] Winsor (2003), op. cit.; Amundson, op. cit., 11. [44] Amundson, op. cit., 16. [45] Ibid., 99. [46] Le paradigme structuraliste n’a pas complètement disparu après 1859. Même dans le monde anglophone une longue lignée de biologistes de première classe a continué à rejeter le pan-sélectionnisme et le fonctionnalisme et a continué à insister sur le fait qu’une fraction significative de l’ordre biologique était d’un motif abstrait non-fonctionnel, le résultat de processus physiques dans lesquels les modèles et les processus non-fonctionnels jouaient un rôle important. Parmi les biologistes principaux qui ont défendu des vues structuralistes se trouvaient William Bateson, qui a inventé le mot génétique, D’Arcy Wentworth Thompson, et récemment Brian Goodwin et Stuart Kaufmann. Leurs points de vue étaient brièvement examinés dans Gould (2002) op. cit. [47] M.J. Denton, C. Marshall, and M. Legge (2002) “The Protein Folds as Platonic forms: New Support for the pre-Darwinian conception of Evolution by Natural Law” (“Les protéines se replient en formes platoniques : Nouveau soutien à la conception pré-darwinienne de l’évolution par loi naturelle,”), J. Theoret. Biol. 219 : 325-342. [48] L’autre explication pour les formes non-adaptatives et homologies structurales proposée par Darwin est de les considérer comme un sous-produit passif d’une sélection active pour une structure véritablement adaptative (comme les allèges dans le bâtiment). Dans de nombreux passages de l’Origine, Darwin fait allusion au changement causé dans un trait de sélection pour un autre trait résultant de lois de “croissance corrélée”. Dans ses mots dans le chapitre 6 : « Dans de nombreux cas, les modifications sont probablement la conséquence directe des lois de variation ou de la croissance, indépendamment d’une amélioration ou pas. ”De tels sous-produits non-adaptatifs sont équivalents aux ‘allèges’ dans les bâtiments (Gould 2002, op. cit., ch. 11) , « espaces laissés en sus”- comme les espaces verticaux entre les marches horizontales d’un escalier ou les espaces triangulaires entre des arcs disposés en réseau linéaire, ou les soi-disant pendentifs des cathédrales médiévales – quatre espaces triangulaires effilés qui sont les conséquences secondaires structurellement nécessaires de la décision des architectes de monter un dôme au sommet de quatre arcs. [49] Darwin, op. cit., ch 6. [49] Ibid., ch. 14. [50] Ibid., ch. 14. [51] B.C. Goodwin (1994). How the Leopard Changed its Spots (“Comment le Léopard a changé ses taches “), (London : Weidenfeld et Nicholson). [52] Voir W. Bateson (1894) Materials for the Study of Variation (“Matériaux pour l’étude de la variation”), (London : MacMillan). Bateson qui a inventé le terme ”génétique” et a été le fondateur du Journal of Genetics, s’est vigoureusement opposé toute sa vie à une compréhension de la forme organique qui soit externaliste et fonctionnaliste. Et, encore une fois, tout comme Owen, sa vision du monde reposait sur une montagne de preuves empiriques, un substrat d’ordre non-adaptatif traversant effectivement le domaine biologique. Dans son Materials for the Study of Variation, il documente de nombreux exemples de variation non-adaptative dans la nature, surtout entre des espèces étroitement apparentées. Il a souligné la façon dont différentes structures dénombrables dans les êtres vivants (comme le nombre de segments vertébraux dans différents groupes de vertébrés ou le nombre de joints dans les membres d’insectes) variaient entre les espèces et faisait valoir que le modèle de variation provenait de forces internes, non-adaptatives, au sein de l’organisme lui-même et n’était pas le résultat de forces externalistes telles que la sélection pour la fonction. [53] D’Arcy W. Thompson (1942) On Growth and Form (Cambridge : Cambridge University Press). [54] Gould (2002), op cit, 1207. [55] Gould (2002), op. cit., 1206. [56] Même avant Darwin, la biologie de langue anglaise était étroitement mariée à une conception à priori fonctionnaliste /adaptative de la nature vivante. Voir Gould (2002), op. cit., ch. 4, et Russell, op. cit. Je me suis moi même déplacé d’une position essentiellement fonctionnaliste quand j’ai écrit Evolution : A Theory in Crisis (“Evolution : une théorie en crise”) à une position plus structuraliste aujourd’hui. [57] J.R. Gribbin et M.J. Rees (1989) Cosmic Coincidences (“Coïncidences cosmiques”), (New York : Bantam Books), ch. 10, 241-269; J.D. Barrow et F.J. Tipler (1986) The Anthropic Cosmological Principle (“La principe cosmologique anthropique”), (Oxford : Oxford University Press), ch. 1. [58] P.C.W. Davies (1982) The Accidental Universe (“L’univers accidentel”), (Cambridge : Cambridge University Press), 118. [59] L.J. Henderson (1958) The Fitness of The Environment (Boston : Beacon Press) ; M.J. Denton (1997) Nature’s Destiny (New York : Free Press). [60] Owen, (1866) op. cit. [61] Denton, op. cit. [62] M.J. Denton and C.J. Marshall (2001) “Laws of form revisited,”Nature, 410 : 417; Denton, et al, op cit.. [63] S.J. Singer and G.I. Nicholson (1972) “The fluid mosaic model of the cell membrane”, Science 175 : 720-731. [64] Denton et Marshll, op. cit.; Denton, et al, op. cit. [65] Ibid. [66] Ibid. [67] Singer et Nicholson, op. cit. [68] H. Driesch (1929) The Science and Philosophy of the Organism (“La science et la philosophie de l’organisme”). (London : A and C Black); H. Driesch (1914) The History and Theory of Vitalism (“L’histoire et théorie de vitalisme”), trans. C. K. Ogden. (London : Macmillan, Co. Ltd). [69] Amundson, op. cit. p 241. [70] G.K. Davis and N.H. Patel (2002) “Short, Long and Beyond: Molecular and embryological approaches to insect segmentation,” (« Court, Long et Au-delà : approches moléculaire et embryologiques à la segmentation des insectes”), Ann Rev Entomology 47 : 669-699; Richards and Davis (1977). [71] Ibid. [72] Amundson, op. cit., 241. [73] S.B. Carroll ( 2006) Endless Forms (“Formes infinies”), (London : Weidenfeld and Nicholson). [74] G.P. Wagner (2007) “How wide and how deep is the divide between population genetics and developmental evolution ?”(“Quelle est la largeur et quelle est la profondeur de la fracture entre la génétique des populations et l’évolution du développement ?”), Biology and Philosophy 22 : 145 – 153. [75] Ibid. [76] Wagner, op. cit. [77] H. Jonas (1966) The Phenomenon of Life (“Le phénomène de la vie »), (Chicago : University of Chicago Press), 94. [78] Ibid., 200–201. [79] Ibid., 95.
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