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Pour une rencontre des esprits

L’incomplétude, un nouveau paradigme

2/17/2017

1 Commentaire

 
Par Jean-François Lambert
​L’opposition entre monisme réducteur et dualisme séparateur n’est pas sans alternative. Une telle alternative suppose cependant l’abandon de la logique habituelle considérée naïvement comme « naturelle » au profit d’une logique autre, une logique de l’absence comme témoin d’une présence. La pensée, I’esprit, le sujet, ne sauraient être objectivement circonscrits et donc leur « présence » n’est pas à rechercher dans, ou à côté. des processus, mais dans l’impossibilité pour les processus de s’auto-justifier. Un certain nombre de travaux montrent en effet, la non-adéquation du mental conscient au neuronal formel, autrement dit l’irréductibilité de la subjectivité au fonctionnement objectif du cerveau.
Nous envisagerons ici des expériences particulièrement spectaculaires, témoignant du fait que la conscience n’est pas réductible à ces conditionnements neurophysiologiques. Les faits rapportés montrent de façon flagrante que la thèse de l’ identité psycho-neurale – tout comme celle du parallélisme – et plus encore celle de la réduction physicaliste, ne vont pas de soi. Les arguments cliniques énoncés ne constituent pas une démonstration de la réalité opérationnelle de la subjectivité. Ils contribuent à montrer que la question de la conscience constitue bien une réalité problématique. Il s’agit plutôt de mettre en scène la manière dont la question de la conscience se pose que de prétendre y répondre autrement qu’en affirmant la Conviction qu’il est vain de chercher à objectiver la subjectivité autrement que sur le mode de l’absence.
APPROCHES EXPERIMENTALES DE LA SUBJECTIVITÉ
Le terme de conscience peut être entendu dans des sens très différents. Il désigne, d’abord, le fait d’être éveillé ou endormi, attentif ou distrait, c’est-à-dire plus ou moins vigilant. Il se rapporte également à ce dont un sujet a connaissance: pensées, sentiments, perceptions rêves, raisonnements… Il renvoie enfin au sens ultime de l’action lorsqu’il s’agit de la conscience morale. La conscience s’offre donc à l’investigation psychophysiologique comme l’expression d’un certain type d’activation du système nerveux aux prises avec l’environnement (niveau de vigilance) et comme la manifestation d’une certaine forme de connaissance s’appliquant au monde et à soi-même (conscience réflexive, conscience de soi).
L’hémisphère gauche: un générateur d’hypothèses ?
Deux problèmes sont présentés simultanément, l’un à l’hémisphère gauche parlant et l’autre à l’hémisphère droit non parlant. Les réponses à chaque problème sont exposées à la vue du patient. (D’après Michael Gazzaniga et Joseph Le Doux, The Integrated Mind (New-York, Plenum, 1978).
Électroencéphalographie et conscience
L’étude des tracés électroencéphalographiques (EEG). associés aux différents niveaux de vigilance chez l’homme, montre qu’à l’évidence, ils ne sont pas liés de façon univoque à un état de conscience donné. En effet, un même type de tracé (bêta) accompagne des états aussi différents que la veille active associée à la conscience réflexive et le sommeil paradoxal associé à la conscience onirique. Inversement, un même état de conscience (la conscience onirique) peut être associé à des tracés aussi différents que le rythme alpha (veille diffuse) et le rythme bêta (sommeil paradoxal).
« Potentiels évoqués » et conscience
L’étude des potentiels évoqués apporte également des exemples frappants de non-concordance entre un état de conscience et un indice électrophysiologique. On sait que l’annulation des potentiels évoqués constitue -avec le silence électroencéphalographiques (EEG plat) – L’un des deux critères de la mort légale (mort clinique). L’absence de potentiel évoqué est a priori considérée comme reflétant une absence de conscience. Or, nous avons pu constater que l’activité évoquée visuelle était pratiquement annulée chez des moines tibétains en méditation. Personne ne doute que les méditants aient, à ce moment, accès à des états de conscience hautement élaborés. L’annulation du potentiel évoqué ne traduit donc pas nécessairement la suppression de toute forme de conscience.
La non-équivalence entre indice électrophysiologique et état de conscience peut encore être illustrée avec la Variation Contingente Négative (VCN). Cette réponse dont on sait qu’elle se développe dans l’intervalle séparant un stimulus préparatoire d’un stimulus impératif est, le plus souvent, absente chez les psychotiques et grands anxieux. Mais elle est également transitoirement supprimée dans des états de satiété (sédation) et de détente (relaxation, méditation). L’annulation de la VCN peut donc être associée à des situations particulièrement contrastées du point de vue des états de conscience vécus par le sujet.
On voit bien, à travers ces exemples, qu’il n’existe pas et ne peut pas exister de représentation électroencéphalographiques de la conscience en tant que vécu subjectif. Il ne peut pas exister de phalographique du vésu subjectif
Y a-t-il quelqu’un ?
Le sujet connaissant celui qui prétend décider apparaît ici comme directement lié à ce qui résiste, ce qui échappe. Mais alors, dans la mesure où lui-même ne peut que résister. Échapper à toute forme d’objectivation, qu’en reste t’il ? Y a-t-il finalement quelqu’un qui décide ? La notion de sujet ne se ramène-t-elle pas seulement à une fiction grammaticale permettant de rendre compte de comportements produits à notre insu ? L’impossibilité radicale de toute forme de totalisation ne rend-elle pas vaine toute tentative d’élucidation du sujet ?
On sait désormais que la conscience ne se résume pas à une intuition claire et rationnelle, une saisie immédiate de l’objet. Il y a comme une altérité interne au sujet- quelque chose qui pense. Il n’est plus possible d’envisager aujourd’hui la question du sujet pensant exclusivement sur le mode du cogito cartésien et il convient de prendre en compte la réalité des processus inconscients. De nombreux travaux confirment en effet que des processus non-intentionnels conditionnent l’activité intentionnelle, c’est-à-dire que la conscience se révèle à travers ce qui est non-accessible comme tel.
Une conscience inconsciente ?
La technique de l’écoute dichotique permet d’envoyer simultanément aux sujets deux messages auditifs différents. Il leur est demandé d’être attentif à l’un des messages. Chacun d’entre nous a une oreille dominante (généralement la droite) pour les sons linguistiques. Le message entendu sur le canal dominant est facilement répété, mais les sujets ne peuvent généralement pas dire grand-chose de ce qui s’est passé en même temps sur l’autre canal. Ils peuvent indiquer qu’ils ont entendu une seconde voix, dire éventuellement que c’était un homme ou une femme et savoir si la voix s’exprimait dans leur langue maternelle mais sont incapables de préciser ce qui a été dit.
Dans l’expérience de Lackner et Garrett on fait entendre, sur le canal principal, des phrases ambiguës du genre  » Le vol n’a duré que dix minutes « . Si l’on ne fait rien entendre sur le canal secondaire (ou quelque chose qui n’a absolument rien à voir) les sujets interprètent aléatoirement ces phrases ambiguës. Mais si on leur fait entendre sur le canal secondaire une phrase suggérant une interprétation telle que << Un cambriolage a eu lieu  » ou  » L’avion a eu une panne « , ils optent majoritairement pour l’interprétation suggérée bien qu’ils soient incapables de répéter ce qui a été dit sur le canal secondaire. Le message reçu par le canal secondaire doit donc être traité jusqu’au niveau sémantique et être compris bien qu’il ne soit pas consciemment perçu. Qui comprend le message secondaire ? Qui interprète la totalité du message ? Il y a dans cette expérience quelque chose de troublant: l’hémisphère gauche est semble-t-il capable de rendre compte de certaines informations gérées par l’hémisphère droit sans pouvoir explicitement dire lesquelles, alors que l’hémisphère droit serait capable de comprendre un message dont il ne peut explicitement rendre compte ! Il y aurait donc dans l’hémisphère droit une forme de conscience inconsciente à l ‘hémisphère gauche. {{Décision motrice et volonté consciente}} Potentiels de préparation motrice précédant un mouvement unilatéral de la main droite (en A) ou bilatéral (en B). Dérivations (de haut en bas) précentrale gauche, précentrale droite, vertex (Cz), pariétale gauche, pariétale droite et pariétale médiane. Le potentiel de préparation motrice est particulièrement ample au niveau du vertex et de la région précentrale. Le trait vertical (zéro) correspond au début du mouvement. Au vertex le potentiel de préparation motrice commence près de 1 500 ms avant l’acte. (D’après R. Kristera et al.) {{L’ incomplétude: un nouveau paradigme L’hémisphère gauche: un générateur d hypothèses ?}} Si on présente simultanément à un patient splitbrain (un sujet dont le corps calleux – ce faisceau de fibres nerveuses qui relient entre eux les deux hémisphères cérébraux- a été chirurgicalement sectionné) deux images (un chalet sous la neige, dans son hémichamp gauche, et une tête de poulet, dans son hémichamp droit, voir figure) et qu’on lui demande de désigner parmi plusieurs autres une image associée, il en désigne deux, une avec chaque main (une patte de poulet avec la main droite et une pelle à neige avec la main gauche). Si on lui demande d’expliciter la réponse de sa main droite, cela ne pose aucun problème à son hémisphère gauche verbal, mais ce dernier se trouve totalement désemparé pour justi?er la réponse de la main gauche (commandée par l’hémisphère droit). Il (son hémisphère gauche) ne tarde pas cependant à inventer une justi?cation de cette réponse de la main gauche (par exemple qu’ il faut une pelle pour nettoyer le poulailler). Le système cognitif de l’hémisphère gauche a besoin d’une théorie pour expliquer une réponse qui lui échappe. De même. si un ordre simple est projeté dans le champ visuel gauche comme « marchez », le sujet l’exécute et si on lui demande où il va, il (son hémisphère gauche) inventera instantanément une raison. L’hémisphère gauche se trouve confronté à la nécessité d’expliquer un comportement patent dont il n’a pas eu l’initiative. Pour Gazzaniga, ce phénomène est le fondement même du système de règles qui aident les gens normaux à se construire un sentiment personnel de perception consciente. Si on projette deux mots différents un dans chaque champ visuel, et qu’ on demande au sujet de dessiner de sa main droite une image de ce qu’ il voit, il dessine d’abord le stimulus reçu par l hémisphère gauche puis complète le dessin selon le stimulus reçu à droite. Si on lui demande de justifier cet ajout, il est étonné, fait quelques griffonnages supplémentaires et produit une interprétation plus ou moins adaptée. Dans la vie quotidienne, c’est en permanence que le sujet se trouve contraint d’interpréter des comportements réels dont la cause échappe à sa volonté consciente, en élaborant une théorie justifiant a posteriori les raisons de leur manifestation. {{Celui qui sait et celui qui dit}} Chez les sujets split-brain chaque hémisphère ignore ce que fait l’autre. Ainsi, ces patients ne peuvent nommer un objet placé hors de leur vue que s’ils le tiennent de la main droite. De même, ils rapportent verbalement les stimuli présentés dans leur champ visuel droit mais sont incapables de dire quoi que ce soit à propos des stimuli présentés dans le champ opposé (gauche, hémisphère droit). Cependant les sujets ou plutôt leur hémisphère droit perçoivent parfaitement ce qui leur est présenté dans le champ visuel gauche, comme en témoigne le fait qu’avec leur main gauche, ils sont capables de sélectionner l’objet correspondant parmi d’autres cachés à leur regard. Cette situation est encore plus caractéristique avec des stimuli à forte valeur affective. Si l’on pro jette dans l’hémichamp gauche (hémisphère droit) du sujet une photo de nu, il manifeste une réaction émotionnelle perçue par son hémisphère gauche qui nie verbalement avoir vu quoi que ce soit (ce qui est exact) mais qui, bien que ne sachant pas ce que l’hémisphère droit a effectivement perçu, va quand même construire une interprétation du trouble ressenti. L’hémisphère gauche, verbal, est donc capable d’élaborer des rationalisations fondées sur des indices partiels et parfois erronés produits par l’hémisphère droit. L hémisphère droit sait même s’ il ne peut pas dire. L hémisphère gauche ne peut s’ empêcher de dire même ce qu’ il ne sait pas ! {{Décision motrice et volonté consciente}} Le fait que, dans une large mesure. le sujet ne soit pas conscient des raisons pour lesquelles il est conscient (les mécanismes de la conscience échappent à la conscience) ne signifie certainement pas que la conscience soit illusoire et le sujet inexistant. Une expérience de Libet pose de façon très spectaculaire la question de l’existence d’un opérateur conscient qui échappe au mécanisme cérébral. Elle concerne l’acte moteur volontaire et touche directement au problème crucial du libre arbitre. Libet a en effet montré que le potentiel de préparation motrice qui est initié plusieurs centaines de millisecondes avant l’acte moteur volontaire comme l’a montré Kornhuber atteint son maximum environ 150ms à200 ms avant l’acte au moment où l’intention d’agir est éprouvée par le sujet. La conclusion quisemble s’imposer est que l’initiation cérébrale d’un acte moteur volontaire, spontané et totalement libre est d’abord inconsciente. Il existe cependant, selon Libet, au moins deux situations dans lesquelles le contrôle conscient est opératoire. Il peut y avoir, d’une part, une sorte de veto qui fait avorter l’acte initié même dans le cas d’un acte volontaire autonome. Cela reste possible parce que la prise de conscience de l’intention d’agir, même si elle apparaît bien après le début du potentiel de préparation motrice, se manifeste encore suffisamment tôt (environ 150 à 200 ms avant le début de la commande motrice proprement dite) pour interrompre le processus en cours. Les sujets de Libet ont effectivement rapporté de telles interruptions associées à des potentiels de préparation a vortés. {{ Le cerveau ne « contient » pas l ‘homme}} Ces expériences, particulièrement spectaculaires, dont l’interprétation reste largement ouverte, témoignent du fait que la conscience du sujet n’est pas réductible à ses conditionnements neurophysiologiques. Comme le souligne Pierre Lévy, « I’explication mécaniste s’arrête devant l’utilité non fonctionnlle du sujet pensant et cette difficulté ne tient ni à des préjugés religieux ni à des raisons théologiques >>. Le sujet est irréductible aux processus neuronaux qui conditionnent son effectivité. Il résiste à toute forme d’objectivation. Toute énumération physicaliste de la personne humaine est -et sera toujours-incomplète. Cette incomplétude- cette radicale impossibilité d’exhiber la totalité que je suis- ne permet de conclure objectivement ni à la présence certaine, ni à l’absence certaine, d’un opérateur métaphysique. Les données objectives ne sauraient permettre- sans contradiction évidente – d’attester de manière irréfutable l’existence de ce qui, par nature, leur échappe. L’homme ne se contient pas Ce qui le constitue – son origine – lui éhappe.
Notre hypothèse consiste à dire que le sujet (I’esprit, le sens) ne cause pas, au sens physique habituel du terme le fonctionnement des neurones, mais s’identifie à la causalité qui s’exprime dans ce fonctionnement. Or la causalité n’est pas représentable: elle se montre dans les » causes »qui conditionnent /e fonctionnement du cerveau. Le rapport de la condition (le cerveau) et de l’inconditionné (I’esprit) constitutif du sujet n’est donc pas représentable: il ne peut q’être vécu que la conscience du sujet n’est nement neurophysiologiques
L’INCERTITUDE: ÉCHEC DE LA RAISON OU RAISON D’UN ÉCHEC
Au contraire du paradigme de la science classique, dominé par les notions de permanence et de stabilité, de prévision et de maîtrise, I’émergence de la physique quantique et la mise en question simultanée des fondements de la logique marquent l’avènement dans le champ du rationnel, des notions d’incertitude(d’incomplétude, d’indécidabilité, qui modifient radicalement le statut de la connaissance et celui du sujet connaissant. Toutefois, alors que cette incertitude pouvait apparaître comme réductible. négligeable, résiduelle, l’évolution de la science contemporaine nous invite à prendre toute la mesure de la positivité de cette incertitude qui se révèle être la condition même de la connaissance.
La fin du rêve laplacien: l ‘avènement d ‘un nouveau paradigme
Le projet laplacien n’a pas survécu à son siècle. Si, en effet, pour un système composé de deux corps en interaction, les lois de Newton permettent de prévoir complètement son évolution dès lors qu’on connaît les différentes composantes des trajectoires de chacun, ceci n’est plus possible pour un système à trois corps (et a fortiori pour un système à n corps). Pour décrire complètement l’ évolution de la position de trois points en interaction dans l’espace. il faut maîtriser un système de neuf relations du type y = f(t). Poincaré a démontré qu’une solution complète au problème des trois corps, c’est-à-dire permettant de calculer leur position à chaque instant par simple substitution à partir des neuf équations en question est rigoureusement impossible. Cela ne signi?e pas qu’il soit impossible de calculer point par point ( pas à pas) de telles trajectoires. mais qu’il n’existe pas (et ne peut pas exister) de solution analytique générale au problème des trois corps. la prévisibilité complète est donc impossible.
Cette première démonstration d’impossibilité inaugure une série de résultats qui, dans les premières décennies du XXe siècle ont définitivement mis un terme à toute velléité de totalisation du savoir.
Wittgenstein et l’indicible
La prétention à la complétude du discours scientifique qui va de paire avec la revendication de certitude. suppose l`existence d’un lantiaoc susceptible te refléter la totalité du réel. Ce sont les conditions de possibilite d’un tel language que Wittgenstein cherche à définir dans Ie « Tractatus logico-philosophicus »
Cette démarche conduit finalement à constater que la structure logique du langage ne peut être décrite à l’intérieur du langage lui-même (le théorème de Gödel, dont il sera question plus loin, exprime la même impossibilité pour tout système formel).Si, pour Wittgenstein, la totalité du langage représente la totalité de la réalité et constitue un tableau complet du monde, il reste que, dans le langage et à travers lui, se montre quelque chose qui ne peut être dit et qu’il appelle  » I’élément mystique « . La proposition constitue la projection (le tableau) d’un état de chose possible. Mais le sens de la proposition ne peut être représenté dans le tableau. Autrement dit, ce dans quoi ou grâce à quoi on représente, n’est pas représentable (est inexprimable).
On peut montrer le sens d’une proposition en accumulant les traductions, mais on ne communiquera jamais que des propositions. L’essentiel, c’est ce qui ne peut pas être dit. Le langage nous permet de dire comment est le monde. Mais il ne nous permet de dire ni ce par quoi il est langage (ce par quoi il a un sens), puisque le fondement de la possibilité du sens est par nature non dicible, ni ce par quoi le monde est ce qu’il est (ce en quoi il trouve son fondement). Le sens se montre dans la structure même de l’énoncé mais ne se dit pas. Il y a donc de l ‘inexprimable au-delà du langage. Mais cet inexprimable n’est pas radicalement étranger au langage, il n en est pas complètement séparé. Au contraire, bien qu’il ne puisse pas être dit, il se révèle comme ce qui limite le langage et en même temps le rend possible. Qu il y ait de l’indicible, c’est finalement la condition pour qu’il y ait du sens.
Gödel et l’indécidable
Nous venons de voir avec Wittgenstein que le langage ne peut pas refléter adéquatement la totalité. Pourtant, la science classique – avec son rêve de prévisibilité absolue – affirme sa volonté de construire un système de représentation exhaustif. Mais pour constituer un tel système formel il faudrait pouvoir démontrer sa cohérence (sa consistance) de manière absolue, sans avoir à présupposer la cohérence (la consistance) d’aucun autre système. Pour éviter le piège de la régression in?nie des énoncés justi?cateurs et celui des fausses évidences de l’expérience sensible, il faudrait donc pouvoir démontrer que la logique est complète et non contradictoire, sans avoir recours à d’autres ressources que les siennes propres, c’est-à-dire qu’elle se suffit à elle-même. La tentative la plus élaborée fut celle de Hilbert, qui prétendait pouvoir démontrer la consistance absolue de la logique de manière purement formelle.
Or, les travaux de Gödel sont venus mettre un terme aux prétentions du programme de Hilbert et ruiner définitivement toutespoir de démonstration de la consistance absolue de la logique. Les résultats de Gödel indiquent, en substance, qu’il est logiquement impossible de donner une démonstration méta-mathématique de la consistance de l’arithmétique et qu’il existe donc des propositions d’arithmétique vraies qu’on ne peut pas déduire des axiomes (des énoncés vrais non démontrables). Il s’ensuit qu’aucune théorie ne peut apporter par elle-même la preuve de sa propre consistance et que l’autodescription complète est logiquement impossible. La consistance implique l ‘incomplétude et la complétude ne peut être obtenue qu’aux dépens de la consistance. La logique ne se contient pas.
Heisenberg et l ‘indétermination
La physique quantique constitue, on le sait, une remise en cause radicale de notre conception de l’univers associée à un changement, non moins radical, du statut de l’observateur. La réalité décrite par la physique n’est plus indépendante des modalités de la description. L’observation suppose la participation d’un observateur et implique une observ ation avec l’objet observé. Mesurer, c’est agir sur le réel ou plutôt interagir avec lui. Une telle interaction perturbe nécessairement l’objet et il s’ensuit que toute mesure est entachée d’une irréductible indétermination expriméé, dans le formalisme de la physique quantique, par la célèbre relation d’incertitude (d’indétermination) de Heisenberg. L’incertain apparaît ici coextensif -sinon du Réel – du moins de la connaissance que nous pouvons en avoir.
Le principe de complémentarité de Bohr met un terme définitif à la dualité onde-corpuscule. L’aspect ondulatoire et l’aspect corpusculaire sont deux expressions complémentaires d’une même réalité. C’est l’acte de mesure, c’est-à-dire l’interaction avec un instrument de mesure et un observateur, qui fait basculer la particule d’un aspect à I’autre. Mais la connaissance de chacun de ces deux aspects est mutuellement exclusive. C’est ce qu’exprime la relation d’incertitude de Heisenberg selon laquelle il est impossible au niveau micro-physique d’attribuer à une particule, simultanément et avec la même précision, une position et une vitesse (quantité de mouvement) déterminées. Cela est lié au fait que pour apprécier la position, il faut utiliser un rayonnement qui va modifier la vitesse. La précision sur la position et le produit des incertitudes ne peuvent pas être inférieur à une valeur fixée par la relation de Heisenberg. Il y a donc une limite absolue un butoir à la connaissance de l’objet quantique. « De tout cela émerge la vision d’un univers irrésolu »
Lacan et l’incomplétude
Même si cela peut paraître surprenant d’enchaîner de la physique à la psychanalyse, il est pourtant tout à fait remarquable de constater que Lacan se situe dans la même logique que les trois auteurs précédents: celle de l’incomplétude. Le sujet, selon Lacan, est un sujet divisé,  » un sujet barré « . Précédé par le langage. il ne peut se structurer qu’autour d’un manque. On est toujours obligé de présupposer quelque chose dont on n’est pas le maître. On ne peut, en effet, rien dire du signifiant qui nous précède mais seulement en constater les effets. Il faut assumer ce manque, accepter l’incomplétude, la faille, la castration, admettre que nous ne sommes pas tout, que nous n’avons pas accès au tout. Mais un tel manque est structurant, c’est avec lui que s’opère dans le langage -le passage de l’imaginaire au symbolique, de la jouissance au désir.
Ce que Lacan appelle l’objet – cause du désir – n’est jamais atteint. Il n’y a jamais coïncidence totale entre la demande et ce qui serait une réponse complète à cette demande. Quelque chose échappe – qui est de l’ordre de l’origine – et c’est pourquoi il convient de n’enfermer le sujet dans aucune forme d’objectivité. On n’a pas prise sur le sujet. Il y a là quelque chose d’irreprésentable. Le désir du sujet circule de signifiant en signifiant mais, contrairement aux signes, le signi?ant n’est pas un message. C’est ainsi qu’il n’y a pas de signifiant qui se signifierait lui-même. Il n’y a pas non plus de méta-langage. Ce qui fait arrêt à la chaîne des signi?ants n’est donc pas un signi?ant ultime qui s’égalerait à sa propre signification mais une fonction que Lacan appelle la fonction  » paternelle .
Avec la division originelle du sujet. on retrouve le même type d’alternative que chez Gödel ou Heisenberg. On ne peut pas ne pas choisir puisqu’on ne peut pas à la fois penser et être. et ce que l’on gagne d’un côté,on le perd de l’autre. Quoiqu’on choisisse, on perd quelque chose. La métaphore de »la bourse ou la vie » est ici très parlante. Je ne peux pas garder et ‘la bourse » et « la vie ». Je ne peux garder la vie qu’ elidée (écornée) de la bourse.
Il apparaît à I’évidence que tant l’étude du langage (Wittgenstein) ou celle de la logique (Gödel) que celle de la structure de la matière (Heisenberg) ou de l’inconscient (Lacan) débouchent sur le même constat d’incomplétude le même horizon d’indécidabilité, la même impossibilité à limiter le vrai à la totalité de ce qui peut être dit, formellement démontré ou immédiatement mesuré.
Ce qui échappe m ‘échappe
Tout ce qui précède conduit au même constat: ça échappe. Reconnaître que quelque chose est formalisable c’est aussi reconnaître que quelque chose de cette chose échappe nécessairement. La formalisation serait impossible si elle n’impliquait pas que quelque chose échappe. Tout ensemble de traces (toute écriture, tout langage, tout système formel, toute mesure) suppose un insu qui, précisément, ne laisse pas de trace mais se manifeste dans les blancs de l’écriture. Le socle même de l’écriture ne peut s’écrire comme le socle du langage ne peut se dire, comme le socle de la logique formelle ne peut se formaliser. Bien que ne pouvant ni s’écrire, ni se dire, le fondement se montre dans l’acte de parole ou d’écriture.
Il désigne ce que je dois d’emblée admettre pour que la connaissance soit possible. En fait, élaborer une théorie de la connaissance, c’est élaborer une théorie de ce qui nous échappe et quand on parle de ce qui échappe on en parle toujours à côté. On peut affirmer que quelque chose échappe mais on ne peut pas dire ce qui échappe. Aucun ensemble de traces n’est donc absolu et aucun discours ne peut s`affranchir du fait qu’il n’est pas complet. On se sert cependant de ce qu’ on ignore parce qu’ on peut l’ effectuer en acte. Mais ce qui est de l’ordre de l’effectuation n`est pas formellement décelable. Puisque la construction initiale est fondée sur l’hypothèse que les blancs ne sont rien, il est impossible de montrer qu’ils sont quelque chose dans ce système. Les blancs n’existent en fait qu’assumés. Toute écriture et tout discours suppose donc un sujet mais ce sujet ne laisse pas de trace. Or, il est toujours possible de nier l’existence de ce qui ne laisse pas de trace. Comment penser alors l’existence d’un sujet qui échappe ?
Aux notions classiques de causalité linéaire, réduction, intelligibilité complète, maîtrise, stabilité, prévisibilité, font place à celles de sensibilité aux conditions initiales, irréductibilité, incomplétude, incertitude, instabilité, imprédictibilité. De tout cela émerge la vision d’un univers irrésolu, d’un monde ouvert à la question de sa signification.
Notes Bibliographiques
M. Gazzaniga, Le cerveau social. Éd. R. Laffont, 1987. B. Libet, Unconscious cerebral initiative and the role of conscious will in voluntary action. Behavioral & Brain Sciences, 1985, 8: 529-539.
P. Lévy, La machine univers. Éd. La découverte, 1987.
L. Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus. Gallimard, Coli. Tel, 1961.
E. Nagel, J. Newman, K. Godel, J.-Y. Girard, Le Théoreme de GodeL Éd. Seuil, 1989. W. Heisenberg. Physique et philosophie. Éd. A.Michel, 1961.
J. Lacan, Écrits. Ed. Seuil, 1966.
1 Commentaire
lisecig link
3/21/2017 02:44:09

Excellente analyse, que je vais immédiatement partager en masse.

Merci
Lise

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